Bus à Hydrogène

la France entrevoit un nouveau protagoniste de sa légende énergétique : l’hydrogène. Comme un personnage émergeant doucement du brouillard, il se présente de manière discrète mais promise. L’hydrogène, fils du nucléaire bas-carbone et des énergies renouvelables arrive pas à pas. Issu de la réforme de l’eau, pur, volatil, il incarne l’ambition d’un pays qui veut marier modernité, souveraineté et respect de la nature.

L’essor tranquille des électrolyseurs

Hydrogène

La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) trace une trajectoire ambitieuse. L’objectif est d’ atteindre 8 GW de capacités d’électrolyse à l’horizon 2035, pour produire près de 1,2 million de tonnes d’hydrogène renouvelable. Cet objectif se pose comme une métaphore stylistique : imaginer, rocaille après rocaille, une montagne en cours de formation.

La Stratégie Nationale (SNH II), revue en 2025, ajuste les voiles. Elle elle oriente l’objectif vers 4,5 GW pour 2030, et repousse les projets à 8 GW pour 2035. Ceci afin de mieux laisser murir la structure industrielle et technique. Car l’électrolyse est l’art de la patience : elle naît de l’eau, du courant, du temps.

Écosystème industriel : l’enchevêtrement des talents

Hydrogène

Aux quatre coins du pays, des géants se dressent. Ainsi, EHM crée un moteur 5 temps en Bretagne alors que Elogen plante sa gigafactory à Vendôme, John Cockerill en Alsace et Genvia à Béziers. Ainsi est née une toile nationale née d’aides publiques (PIIEC, PIA, France 2030) dans notre pays. Ces acteurs, tels des artisans fidèles, façonnent l’avenir : chaque électrolyseur, chaque pile, chaque station, compose un fragment de récit industriel empreint de volonté et d’expertise.

Vert : couleur fertile des ambitions françaises

L’hydrogène vert est cet être d’eau et d’énergies douces. À Bouin, dans la Vendée, la startup Lhyfe apprend au vent et à l’eau à donner naissance à ses bulles : depuis 2021, l’éolien couplé à des électrolyseurs produit un hydrogène pur et silencieux, sans ombres de carbone. Il se dit que France 2030 ne rêve pas seulement d’innovation, mais d’une « souveraineté technologique »: 400 MW d’électrolyse sont déjà fixés dans le paysage national, d’autres projets attendent leur heure (Gen’Hy, Masshylia, Green Lhyfe…).

Mobilités : chemins vers des horizons nouveaux

L’hydrogène déploie ses promesses sur le macadam, sur les rails, sur les vagues et dans les airs. À Fos-sur-Mer, à Dunkerque, dans la Vallée de la Chimie, la création de hubs structurants se dessine ; un réseau de 500 km de pipelines hydrogène s’annonce pour relier production et usage..

  • Poids lourds, bus, véhicules utilitaires : ici, la puissance se conjugue à l’autonomie.
  • Trains à hydrogène : Alstom a tissé son réseau dans l’Hexagone, de Reichshoffen au Creusot, porté par Hynamics sur le site d’Auxerre.
  • Aviation & maritime : des projets comme KerEAUzen, DéZir, BioTjet, TakeKair visent à offrir des carburants synthétiques durables typés « E‑SAF .
DéZir Renault

Avantages (la lumière dans la vallée)

Sur sa route, l’hydrogène fidèle porte un trésor :

  • Environnement : aucun rejet de CO₂ sur site lorsqu’il est produit via électrolyse avec énergies bas‑carbone.
  • Énergie : il compte sur la richesse nucléaire et renouvelable du pays, valorisant l’excédent électrique, stabilisant un réseau parfois.
  • Économie : création de dizaines de milliers d’emplois dans la recherche, la production, l’exploitation…
  • Souveraineté : une France capable de produire « sa propre énergie moléculaire », sans dépendre des intempéries géopolitiques.

Défis : les roches sous le sentier

 Il est une vérité que chaque montagne recèle : sous le vert tendre se cachent des terres ardues :

  • Coût : l’hydrogène vert reste de 3 à 6 fois plus cher que l’hydrogène gris (issue du gaz naturel). Le prix de l’électricité contribue à plus de 50 % du coût global.
  • Rythme : seuls 300 MW ont été sécurisés à ce jour — la France figure dans le trio européen de tête, mais la pente vers les gigawatts reste raide.
  • Technologie : certains électrolyseurs (SOEC, AEM) demeurent au stade du prototype. La pile à combustible, elle, réclame du platine et du recyclage.

Infrastructures & régulations : 500 km de canalisations, hubs, sécurité, normalisation… tout reste encore à bâtir.

Épilogue : le chant des molécules

H2

La filière hydrogène française écrit désormais un poème énergétique singulier. Tel un arpège, il mêle la vertu de l’eau, la puissance du soleil et du vent, l’acier des usines, la finesse des piles à combustible. Aux confins de l’industrie lourde, de la mobilité, de la biochimie et de l’aéronautique, ce sont les perspectives qui dérangent : elles osent penser une France autonome, riche de ses territoires et de ses savoir-faire.

Et pourtant, derrière chaque strophe, subsiste une tension : celle d’un équilibre à trouver, entre l’idéalisme d’un monde bas‑carbone et la dure évidence des coûts et des délais. Un défi, plus noble qu’un risque : fédérer talents, capitaux, régules, politiques, pour que l’hydrogène français ne soit pas une chimère, mais un acteur de demain — stable, généreux, neuf.

La France rêve, patiemment, d’une filière hydrogène souveraine, vibrante de technologies vertes, ancrée dans ses territoires. Elle façonne ses récits industriels dans les ateliers des électrolyseurs, irrigue ses routes et ses voies ferrées de nouvelles molécules, tout en affrontant la rigueur économique et technique propre à tout essor. Si la volonté politique, l’innovation, et la régulation cohabitent harmonieusement, alors l’hydrogène deviendra, plus qu’un projet, une belle histoire écrite à l’encre de l’eau et de la lumière.

Découvrez nos autres reportage sur la mobilité verte :